DIMENSIONS CULTURELLES :
UN AVANTAGE CONCURRENTIEL
Lorsque Geert Hofstede, ingénieur chez IBM, lance au début des années 1970 une série d’enquêtes statistiques au sein du personnel de la multinationale américaine, il ne se doute pas qu’il vient de déclencher une petite révolution dans le domaine des sciences sociales.
L’objet de ses questionnaires est de comprendre les grands ressorts culturels qui nous animent et qui font qu’un anglais réagit différemment d’un indien, un australien ou un mexicain dans une situation donnée.
Le concept de dimension culturelle était né !
La notion de dimension culturelle
Au cœur de la réflexion de Geert Hofstede, il y a cette fameuse notion de dimension culturelle. Les enquêtes qu’il a menées l’on conduit à faire ressortir 4 grandes dimensions :
– l’importance de la hiérarchie sociale,
– la relation à l’incertitude,
– l’individualisme,
– la répartition des rôles homme/femme.
Son analyse l’amène à la conclusion que chaque culture se situe plus ou moins à un des extrêmes de ces quatre dimensions. Un individu appartenant à une culture particulière aura tendance à réagir aux évènements et circonstances en fonction de ce mix.
Précurseur dans son domaine, d’autres lui ont emboîté le pas et le modèle qui a depuis longtemps fait ses preuves, n’a cessé de s’enrichir.
D’autres dimensions sont venues compléter ce schéma au fil du temps :
– l’attachement au court ou long-terme dans les prises de décisions,
– la place accordée aux normes en matière de comportements sociaux,
– les styles de communication directs ou indirects, …
Autant de critères qui, si on les maîtrise au moins dans les grandes lignes, sont très utiles pour gérer au mieux des équipes multiculturelles où les réactions des individus à un même stimulus peuvent varier du tout au tout, uniquement en raison de biais culturels.
Focus sur une dimension très parlante :
La place de la hiérarchie dans les relations interculturelles
Cette dimension analyse la place du statut dans la configuration d’une société et par extension, d’une organisation, d’une structure, d’une équipe de travail.
Dans certaines cultures, la place de chacun doit être établie avec précision. Il y a ceux qui décident, dirigent et ceux qui exécutent. Dans ce type de sociétés très hiérarchisées on attend du chef qu’il donne des instructions claires et il ne viendrait pas à l’esprit des participants à une réunion par exemple de contredire les directives.
Au contraire, dans des cultures plus égalitaires, il y a un responsable parce qu’il en faut bien un, mais il peut être challengé. Il s’attend d’ailleurs à l’être, et serait surpris si ses collègues ne lui faisaient pas part de leur avis.
Petite illustration de ce phénomène :
Dans une vie antérieure, j’ai eu la chance de visiter des collègues au Japon pour leur dispenser une formation préparée par nos soins au siège de notre compagnie parisienne.
Séjour très agréable, accueil parfait et dans les règles de l’art, mais 2 ou 3 jours de formation sans aucun commentaire, question ou début de remise en cause de la part de mes collègues japonais.
Quelques moments de solitude, croyez-moi !
Pourquoi une telle attitude ?
Tout simplement parce que le responsable du département participait aux sessions et qu’il n’était pas envisageable pour ses subalternes de prendre la parole. Seul lui aurait pu le faire, mais comme je représentais le siège, je devais être, malgré mon jeune âge à l’époque, être considérée comme responsable en chef de cette formation : impossible donc de me contredire moi non plus …
Lors de ce même voyage et pour des questions pratique de déplacement, les équipes américaines situées à Hawaï nous ont rejoint au Japon pour suivre cette même formation les jours suivants.
Et là, changement de décor : les questions et les challenges sont apparus avant même que j’ai pu lancer la première session d’introduction…
Fini le privilège du siège et du statut, place à la discussion à bâton rompu et ouverte à tous les collaborateurs indépendamment de leur position hiérarchique.
Une semaine extrêmement formatrice … pour moi en tous les cas !
Je venais de vivre en direct le grand écart culturel entre la société japonaise hyper-hiérarchisée et la société américaine bien plus égalitaire.
Bonne leçon lorsque l’on a à faire fonctionner des équipes aux backgrounds culturels très différents.
Pour conclure
Il est bien sûr très important de ne jamais considérer ces fameuses dimensions culturelles comme inscrites dans le marbre et inébranlables. Partir du principe que tous les français réagiront toujours d’une certaine façon à tel ou tel type de situation serait tout simplement absurde ! Chaque être est unique, a son propre parcours, sa propre courbe d’expérience.
La notion de dimension culturelle a cependant pour mérite de dessiner les grandes orientations intrinsèquement liées à la culture dans laquelle nous avons grandi.
En effet, la culture à laquelle nous appartenons est un ensemble de croyances, valeurs, modes de vie, techniques, … qui nous sont transmises dès notre naissance et souvent sans que nous en ayons conscience. Ce biais nécessaire à notre construction en tant qu’individu est tenace et nous accompagne tout au long de notre vie d’adulte, en société comme au bureau.
Se familiariser avec les grandes dimensions culturelles est un atout pour se comprendre soi-même, comprendre les autres et mieux réussir.
C’est aussi cela les bonnes manières, l’ouverture à ce qui est différent, pour aider à avoir confiance en soi dans des situations où la diversité des points de vue est une source de richesse, si on prend la peine de bien les appréhender.
La réussite professionnelle dans des environnements multiculturels est à ce prix.